CORDOBA REUNION

Auditorium E.N.M.D.
24 Janvier 2006

Minino Garay : percussions

Javier Girotto : saxophones

Gerardo Di Giusto : piano

Carlos Bushini : basse et contrebasse


Audience des grands jours pour le concert de Córdoba Reunion. L'auditorium de l'E.N.M.D. archi-comble n'aurait pu accueillir un spectateur de plus.
Certes Minino Garay n'est pas un inconnu à Charleville-Mézières, s'étant déjà produit auparavant à 3 reprises, avec Julien Lourau Groove Gang, puis avec Daniel Mille, et enfin avec ses "Tambours du Sud" pour une soirée organisée par l'équipe des "Tambours de Fête" au Théâtre Municipal. On connaît le charisme de ce percussionniste d'exception, qui a sans doute incité une partie du public à ne pas manquer ce concert. Et puis, l' "Argentina Jazz" était un genre nouveau dans la programmation de Charleville Action Jazz.
Une partie du public avait sans doute les enregistrements de Gato Barbieri en mémoire, et désirait confronter ses souvenirs à la musique de Córdoba Reunion. Ces auditeurs n'ont sans doute pas été déçus, encore qu'il n'y ait que peu de points communs entre ces univers. Ici pas de soliste promenant son saxophone sur un foisonnement de percussions, mais un groupe soudé, sans véritable leader. Chaque musicien est tour à tour compositeur, et tous se partagent les chorus. On a droit à quelques beaux passages en trio mettant en valeur le magnifique jeu de piano de Di Giusto, quelques duos Girotto/Garay, le saxophoniste s'arqueboutant avec son soprano face à la batterie de Minino Garay, mais le plus souvent, le quartet joue avec un bel équilibre.
Il s'agit avant tout d'une formation jazz, mais les rythmes installés par le percussionniste batteur sont typiques de l'Argentine. Le tom basse de la batterie a été remplacé par un "bombo leguëro", tambour traditionnel de ce pays, et une sorte de tambourin "caja" a été ajouté à gauche de la caisse claire. Minino utilise aussi régulièrement le cajon sur lequel il est assis, ainsi que quelques percussions à main de la famille des maracas. Ce savant mélange d'instruments traditionnels et modernes est à l'image de la musique: les racines sud-américaines servent de tremplin à l'expression d'une sensibilité contemporaine.
Javier Girotto est impressionnant, autant sur des ballades (magnifique composition personnelle "Marcari"sur fond de percussions et onomatopées de Minino), que lors de longs chorus sur lesquels il repousse les limites de son soprano à la raucité très sensuelle. Carlos Buschini délaisse souvent sa contrebasse pour une basse électrique six cordes, surtout lorsque les morceaux s'appuient sur des rythmes de danses traditionnelles. Quant à Gérardo Di Guisto, son jeu percussif et sa science harmonique évoquaient parfois Chick Corea, et ses compositions donnaient vraiment envie de découvrir son projet "Di Giusto Y Camerata Ambigua", pour piano et Quintet à cordes, qui vient de faire un triomphe au festival Son d'Hiver...( écoute et vidéo en ligne). sur leur site internet www.camerata-ambigua.com
L'Argentine n'était pas présentée comme dans un dépliant touristique, mais comme un pays à l'histoire douloureuse que ces quatre déracinés originaires de la ville de Córdoba évoquent avec émotion. La composition "Danza de las Madress", évoquant le combat de ces mères courage réclamant des nouvelles des disparus sous la dictature militaire était de ce point de vue sans équivoque.
Le public, gagné par l'émotion a réclamé un rappel. Les musiciens visiblement sensibles à cet accueil chaleureux ont conclu le concert en faisant chanter à la salle une petite ritournelle sur laquelle le saxophone de Javier Girotto a fait des merveilles.
Beau final pour un concert en tous points mémorable.
Patrice Boyer

 

Photos Dominique Rieffel

 









 

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